Lecture: La jeunesse véritable levier du global soft power marocain

Publié il y a 2 ans

Par Ahmed Djamai

La moitié de la population mondiale a moins de 30 ans. Nous sommes entrés dans une phase où la carte économique du monde évolue rapidement et stratégiquement. Dans ce contexte, le youth empowerment est la clé du succès actuel et futur du Royaume. Au Maroc, le rapport de la commission spéciale pour le nouveau modèle de développement a défini des priorités programmatiques sectorielles jusqu’à 2035. Cette nouvelle ère, que plusieurs peuvent qualifier de nouveau contrat social, met l’accent sur le rôle que pourra jouer l’État et le citoyen afin de faire émerger un Maroc davantage inclusif, solidaire et centré sur le capital humain. Tout cela justifie les orientations prises par Sa Majesté et le Royaume pour passer à un État social plus résilient grâce à ses jeunes et moins fragile devant les crises, comme ce que nous avons vécu durant la crise du COVID 19, et la priorisation des secteurs vitaux que sont la santé, l’éducation et l’emploi.

Quant à la transformation économique, des réformes majeures sont à actionner en vue de renforcer les compétences économiques des acteurs territoriaux, appuyer davantage les investissements productifs avec des initiatives réussies telles que les plans et stratégies de la substitution à l’importation et celui de la préférence nationale, valoriser l’économie sociale comme secteur économique structurant et faire face à des problématiques telles que l’informel ou les défis des NEET, pour impulser et sécuriser davantage les initiatives entrepreneuriales productives particulièrement celles portées par les jeunes.

Ces chantiers passeront par des politiques budgétaires agiles, des politiques fiscales efficaces et un cadre d’investissement plus attractif avec l’arrivée de la nouvelle charte d’investissement, tant attendue par tous les opérateurs.

La nécessité d’intégrer les jeunes dans cette nouvelle carte économique, sociale et sociétale

J’ai passé les 15 dernières années de ma carrière professionnelle à travailler sur le Youth Empowerment où j’ai abordé des questions telles que l’employabilité, l’entrepreneuriat ou la migration auprès des agences de coopération internationale et du secteur privé. Le constat est alarmant. Nous devons changer de paradigme et il est plus qu’urgent d’associer les jeunes à la résolution des problèmes.

En marge de l’ouverture de la session parlementaire en octobre 2017, S.M. le Roi Mohammed VI avait donné ses hautes orientations pour l’élaboration d’une nouvelle politique intégrée dédiée à la jeunesse marocaine, qu’il a qualifiée de véritable richesse et de moteur du développement du Royaume. Sa Majesté revient sur la question de la jeunesse dans plusieurs discours royaux pour pointer du doigt l’inadéquation entre formation et intégration professionnelle ou celle de l’émergence des talents des jeunes via la promotion de l’écosystème entrepreneurial qui leur est dédié.

Comme le soulignait également la constitution de 2011, la jeunesse doit être perçue et traitée comme un don démographique qui peut piloter nos ambitions économiques. Nous possédons cette chance qui manque à tant de pays développés. Il faudra donc accélérer les changements structurants pour promouvoir l’émergence des talents et profiter pleinement du cadre, du contexte, de la volonté, de l’intelligence collective pour accélérer ces changements structurants.

Stimuler et encourager l’esprit d’entrepreneuriat chez les jeunes

L’un des changements majeurs à mettre en place rapidement concerne l’orientation. A l’instar de plusieurs expériences pilotes au niveau international, les enfants devraient découvrir les voix de l’intégration professionnelle dès le primaire. Ils pourraient s’initier aux possibilités futures de leurs carrières et ainsi comprendre que la réussite professionnelle ne veut pas dire forcément passer par un métier de « Col blanc ». Apprenons-leur que ce qui prime est d’exceller dans ce qu’ils entreprennent comme choix professionnel.

 Ensuite, vient la culture sociétale avec le fait que la réussite professionnelle pour plusieurs familles et leur entourage est liée au salariat. Le rêve de plusieurs parents était de voir leurs enfants décrocher un emploi stable dans le public et devant sa capacité limitée à recruter, la vision a évolué avec l’émergence d’un secteur privé fort et mieux structuré. Cela dit, il est moins fréquent d’observer que la famille marocaine encourage son enfant à entreprendre, à oser et à risquer. D’où le dilemme du choix entre la stabilité et le risque d’oser la réussite…mais autrement.

En plus, l’initiation à l’esprit entrepreneurial est liée à la question de l’orientation. Le secteur public et privé est invité à renforcer les formules et actions de sensibilisation à l’esprit entrepreneurial. Certaines actions existent à partir de la phase du lycée mais doivent commencer plutôt afin d’encourager la prise d’initiative, le leadership et le changement de perception quant au choix entre l’emploi ou l’auto-emploi.

Ces actions de sensibilisation gagneront en puissance au sein de l’Université, qui doit être dotée de vrais moyens pour encourager les initiatives entrepreneuriales des jeunes. Ceci passera par dispenser des disciplines et modules dès la première année, attaquant la question et renforçant ainsi les perspectives professionnelles futures des étudiants. L’organisation de compétitions internes ou intra-universités et écoles pour stimuler l’esprit de compétitivité et d’inspiration. Finalement, plusieurs universités au monde trouvent leur compte et équilibre financier en appuyant ces jeunes entreprises ou en s’associant au secteur du privé via la R&D, ce qui permet de renflouer conséquemment leurs budgets et vérifier la durabilité de leurs actions. Ce cadre doit être inséré dans une politique orientée résultats visant la croissance du nombre d’entreprises et d’emplois crées ou le nombre de brevets d’inventions déposés.

Instaurer un esprit de confiance transversal et profond autour des jeunes et de leurs initiatives entrepreneuriales.

D’ailleurs, les administrations sont garantes du pilotage des politiques publiques, l’association stratégique et consensuelle du secteur privé au Maroc, que je qualifie de responsable et patriote, permettra indiscutablement l’atteinte des objectifs de développement.

La promotion d’un écosystème pour l’entrepreneuriat des jeunes peut gagner donc en force via de nouvelles alliances, des partenariats liant les deux opérateurs tout en s’orientant vers des secteurs économiques de niches ou ceux qui ont besoin d’être réinventés. Plusieurs initiatives louables sont en train d’être pilotées et gagneront en sens et en exemplarité avec l’atteinte des résultats escomptés.

Cette promotion de l’écosystème de l’entrepreneuriat lié aux jeunes peut être renforcé via Les canons de la diplomatie économique; je pense personnellement que vu son rôle du propulseur du paradigme du gagnant-gagnant dans le continent africain, et interlocuteur fiable pour les occidentaux, le Maroc peut jouer le rôle de catalyseur de la promotion de l’entrepreneuriat des jeunes en Afrique et puiser sur les nouvelles approches de coopération triangulaire, tout en vérifiant l’aspect de l’alignement aux politiques nationales de ces pays.

Il s’en suit que le digital et la transformation numérique révolutionne tous les secteurs avec des retombées prouvées et le Maroc a le cap de devenir une « digital nation ». Cette ambition sera à notre portée en plaçant le digital au cœur de toutes les initiatives sectorielles et stimulera l’innovation de nos jeunes déjà connectés à ce monde. Nous avons donc tous les atouts et il ne reste qu’à adapter le cadre pour instaurer une culture numérique effective autant sur le plan de la modernisation des administrations, que sur les plans de formation et de création de valeur.

En ce qui concerne le fiscal et la commande publique, les jeunes start-ups doivent être conséquemment impulsées de part et d’autre avec l’arrivée d’un modèle de start-up nation qui simule l’incitation à recourir à leurs services et faire confiance à leur capacité d’agilité, de productivité et d’innovation. Ceci passera, entre autres, par une révision de l’IS appliquée auprès de ces entreprises et l’encouragement de la commande publique également.

 

Ahmed Djamai

Jeune spécialiste de la gestion de projets de coopération internationale, des programmes de la responsabilité sociétale et entrepreneuriale des entreprises, et la promotion de l’autonomisation des jeunes en Afrique.

L'actu en continu