L’expert en immobilier, auteur du guide “Répons’IMMO” et fondateur du site www.reponsimmo.com, Amine Mernissi, explique, dans un entretien à la MAP, l’impact du Programme d’aide au logement sur le secteur immobilier.
1- Quel serait l’impact du programme d’aide au logement sur le secteur de l’immobilier ?
L’impact attendu du programme d’aide directe au logement est d’avoir une portée sociale et économique.
Sociale, parce que ça offrirait l’opportunité à des milliers de ménages marocains d’accéder pour la première fois à la propriété d’un logement. Ceci à l’aide d’une subvention de l’Etat conséquente. Pour un bien résidentiel de moins de 300.000 DH, une aide financière de 100.000 DH. Soit le tiers ! Et pour un bien dont le prix de vente variant entre 300.000 et 700.000 DH, une aide de 70.000 DH. Cet effort des pouvoirs publics est à saluer dans un contexte marqué par l’inflation galopante et la cherté de la vie de façon globale. Ceci constitue donc une mesure concrète de soutien au pouvoir d’achat des ménages.
Pour le volet économique, personne n’ignore l’adage “quand l’immobilier va, tout va”. Par conséquent, l’effet d’entraînement de ce programme sur les différents pans de l’économie nationale est également salutaire.
À commencer par le premier secteur concerné, à savoir celui du BTP (bâtiment et travaux publics) et de l’immobilier qui avaient grandement besoin d’un nouveau souffle et d’une dynamique à même de le sortir de la torpeur dans laquelle il était plongé depuis au moins 2021, date à laquelle le programme de logements à 250.000 DH a pris fin.
Aujourd’hui, une vision nouvelle est tracée pour les cinq prochaines années (2024/2028) et cela est de nature à ramener non seulement de la visibilité mais aussi de la confiance pour les opérateurs qui voient que l’Etat donne le “la” en matière de politiques publiques et d’investissements.
2- L’ambition affichée par le ministère est de produire environ 114.000 unités par an, dont 58.000 destinées à la classe moyenne. Qu’est-ce que vous en pensez ?
J’en pense que pour atteindre ces chiffres, l’expérience ou plutôt l’historique ont démontré que pour réaliser, c’est le secteur privé qui le fait à plus de 90%. C’était notamment le cas pour les logements à 250.000 DH.
Par conséquent, nous savons tous que le logement destiné à la classe moyenne est le parent pauvre de la production immobilière dans notre pays, et ce, depuis que le foncier dans les villes a augmenté de façon exponentielle, ou est introuvable pour développer ce type de produits.
Aujourd’hui l’équation est la même. Pour que les promoteurs immobiliers privés puissent emboîter le pas à ce programme, il faut que les conditions économiques et de rentabilité soient au rendez-vous.
Du foncier disponible à prix réduit et pas à 25 km des centres villes est une première condition indispensable pour produire des logements destinés à la classe moyenne.
Ensuite, il y a d’autres paramètres qui entrent en ligne de compte et qui sont de nature à créer un effet d’entraînement : la fiscalité, le financement, et la célérité administrative. Je peux vous dire que si tout se rejoint, les chiffres que vous mentionnez pourraient être multipliés par 2 ou 3 !
3- Quelles sont les conditions nécessaires à la réussite de ce programme ?
La plateforme www.daamsakane.ma, active en date du 2 janvier, connait une grande affluence, ce qui montre l’attente mais aussi l’appétence des Marocains pour ce programme et de façon générale pour l’accès à la propriété.
Nous l’avons dit précédemment, pour que ce programme réussisse, il est indispensable que les opérateurs privés le prennent à bras le corps. Ces milliers de demandes qui affluent tous les jours sur le portail dédié, sont en fait un puissant indicateur de la physionomie du marché, à savoir de la demande, des besoins en logement des Marocains à travers les régions et les villes du Maroc.
Si ces données sont partagées publiquement, elles renseigneront de façon précise les opérateurs sur les lieux en demande et aussi les types de biens à produire.
Autre volet de la condition de réussite de ce programme, c’est l’accès au financement pour les acquéreurs. Il faut qu’il soit fluide et idéalement à taux réduit. Car si l’aide directe de l’Etat est conséquente, il n’en demeure pas moins que le reliquat fera l’objet d’un crédit immobilier pour la très grande majorité des acquéreurs.
MAP